En Septembre 1944, les libérateurs anglais furent accueillis dans les rues seclinoises par des habitants en liesse. Mais au cours de la libération d’Octobre 1918, il en fut tout autrement.
Exilés de force vers la Pévèle, c’est là que les Seclinois surent que leur délivrance était chose acquise.
Bouvines, village d’accueil pour les réfugiés seclinois
Au terme de leur fulgurante avancée au printemps, les forces allemandes reculent, entrainant avec elles près de 135 000 civils dans leur sillage. Le 1er Octobre 1918, les forces allemandes
évacuent de nombreuses villes ou villages. Cet exil forcé a plusieurs conséquences. Tout d’abord un pillage systématique des ressources disponibles, c’est du moins ce qui ressort des analyses de
l’époque. Les témoins signalent que les soldats faisaient souvent main basse sur « la graisse ou le cacao » distribués par les Comités d’Alimentation. Un pillage qui entrainera également une mise
à sac et une destruction à grande échelle, notamment à Seclin. Mais tout cela se fera à l’abri des regards des habitants exilés de force par exemple vers Lille pour Houplin-Ancoisne. Les
Seclinois seront divisés entre Bouvines, Louvil, Cysoing, Cobrieux.
Bouvines n’est alors occupé que par 438 habitants : seulement 9 hommes de 18 à 48 ans côtoient 155 enfants, 212 femmes et 62 vieillards. Ils sont vite rejoints par une foule d’un millier de
Seclinois et de
Gondecourtois. Là encore, ce sont majoritairement des femmes, des enfants et des vieillards qu’on amène, sans pour autant apporter une quelconque aide sanitaire ou alimentaire. Les ressources
disponibles n’excédant pas trois jours. Deux médecins de Cysoing et un de Seclin sont présents.
Pourtant à Louvil, les seclinois trouvent de quoi se nourrir auprès du Comité d’Alimentation. Les prix pratiqués sont d’ailleurs bien en deçà de ceux qu’ils connaissaient : un kilo de pomme de
terre s’y achète 0.30 frs contre 1.50 quelques jours auparavant.
Au milieu de ces anonymes, quelques notabilités seclinoises. Le maire de l’époque, le filateur de lin, Claude Guillemaud, est accompagné de Victor Dujardin, le fabricant de sucre et d’Achille
Desurmont, le président de la Société du Gaz. Le notaire suppléant, Poillon discute avec l’adjoint René Lignon. Enfin notons la présence d’Eugène Smith, directeur de la filature Drieux, qui
venait à peine de revenir «exténué» de son enfermement au Fort de Maulde, le 5 Avril 1918.
Tout le monde attend dans l’angoisse, car on annonce déjà de prochains départs vers la Belgique ; pourtant ce sont des convois allemands qui défilent, « toutes sortes de véhicules enlevés dans
les fermes, chargés de tapis, rideaux, matelas, linges et surtout des pendules. Il y avait jusqu’à des chars à bras poussés et traînés par une demi-douzaine de Boches sous l’ordre d’un officier
assis sur le chargement… »
Au terme d’une défense au niveau du Bas Sainghin, les quelques militaires allemands chargés de la défense de la Marque quittent Bouvines. Au cours de la libération du secteur, le sergent T.
Barrow se signale pour son initiative et sa témérité. La Gazette d’Édimbourg, en date du 4 Décembre 1919 mentionne son fait d’arme : « Près de Bouvines le 18 octobre 1918, il mena ses hommes avec
un tel élan et habileté qu’une route bifurquée commandant l’approche au village de Bas Sainghin, défendu par des mitrailleuses, a été saisie et le village dégagé de l’ennemi. Plus tard, bien que
l’ennemi soit toujours en force sur son flanc, il a forcé le croisement de rivière de La Marque, contraint les arrière-gardes ennemies à évacuer Bouvines. Son initiative intrépide a inspiré ses
hommes avec une complète confiance.»
La veille, le 17 Octobre, un autre bataillon, le 1/8 King’s Liverpool avait libéré Seclin.
Nos libérateurs, le King’s Liverpool
La formation de ce régiment remonte à 1685 et était affecté à la Princesse Anne du Danemark. La liste des campagnes auxquelles il participa avant la Grande Guerre évoque l’étendue de l’Empire
colonial
britannique à l’époque Victorienne : l’Inde en 1857, l’Afghanistan de 1878 à 1880 et la guerre des Boers en Afrique du sud de 1899 à 1902. Engagé dès le mois d’août 1914, ce régiment devra battre
en retraite après la percée allemande de Mons. Après la bataille de la Marne, il sera presque exclusivement affecté à la ligne de front des Flandres, de la Picardie et de la Somme.
Six hommes se verront remettre la plus haute distinction militaire britannique, la Victoria Cross. Trente officiers et cent dix-huit soldats se verront décerner la médaille des forces de guerre
territoriales. Le 1/8 King’s Liverpool délivre Seclin, une borne commémorative un peu oubliée sur la route Gondecourt Seclin vient nous rappeler ce matin du 17 Octobre 1918.
Aux soldats qui pensaient qu’à l’annonce de l’armistice, ils pourraient rentrer sain et sauf dans leur « home sweet home », l’état-major affecta le 17e à un autre front, dans une autre guerre.
Ils se
retrouvèrent à Archangel en Russie. Les alliés soutenant alors les « blancs » tsaristes contre l’Armée Rouge bolchevique.
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